La légalisation du cannabis : comment les employeurs doivent-ils s’y préparer?

19 mars 2018

Tel que l’avait annoncé le gouvernement fédéral en avril 2016, la légalisation du cannabis entrera en vigueur le 1er juillet 2018. Bien que le projet de loi 157 du Québec, édictant la Loi encadrant le cannabis, prévoit de nombreuses dispositions, aucune d’entre elles ne traite de la consommation du cannabis en milieu de travail. Par contre, cet aspect de la légalisation est d’une importance capitale puisque l’abus de substances psychotropes, tel le cannabis, entraînera l’augmentation du risque d’accident du travail, du taux d’absentéisme, des problèmes relationnels et des réclamations d’indemnité de maladie et la diminution de la productivité. Pour cette raison, l’employeur se doit de bien se préparer et de mettre sur bien un système paré à toutes éventualités; mais comment s’y prendre?

Rappelons d’abord que l’employeur a l’obligation de protéger la santé et la sécurité de tous ses employés, tout en respectant leur droit à la protection de la vie privée ainsi qu’à l’intégrité physique. L’employé a, toutefois, lui aussi l’obligation de veiller à sa santé et à sa sécurité. Ainsi, il est d’autant plus important d’envisager les répercussions qui découleront de cette légalisation et de prendre les moyens adéquats pour un changement en douceur. Pour y arriver, l’employeur devra suivre une démarche se déroulant en trois étapes.

Il sera primordial d’adopter une politique à l’égard de la consommation du cannabis. S’il existe déjà une au sein de l’entreprise, il faudra s’assurer de la mettre à jour afin qu’elle s’étende au cannabis. Celle-ci devra faire le point sur l’interdiction de possession, de consommation et de trafic de drogues, mais aussi sur l’imposition de tests de dépistage, sur les mesures à adopter dans les cas de dépendances et sur les mesures disciplinaires applicables à la suite d’un comportement dérogatoire. Elle pourra d’ailleurs s’appliquer à des situations hors des lieux du travail, tel qu’à un chauffeur d’autobus sur appel, sans pour autant violer le droit à la vie privée de l’employé. Ses restrictions pourront être plus sévères que celles appliquées en vertu du projet de loi, pouvant même aller jusqu’à une politique de tolérance zéro.

Toute la documentation de l’entreprise devra, par la suite, refléter cette nouvelle réalité qu’entraînera la légalisation du cannabis. À cet effet, il pourrait être nécessaire de négocier des modifications de dispositions à la convention collective ainsi que de renouveler les manuels de l’employé et les sites web. Aucun document à la disposition des employés ne devra être mis de côté, pour ainsi assurer une bonne protection!

Finalement, il sera important de divulguer l’information nécessaire aux employés, aux superviseurs et aux gestionnaires afin qu’ils puissent remplir leurs obligations. Les employés devront être sensibilisés sur les effets et les problèmes reliés à la consommation de cannabis. Un message clair concernant le niveau de tolérance de l’entreprise devra, de plus, leur être acheminé et la politique applicable devra être mise à leur disposition en s’assurant qu’ils en prennent connaissance. En ce qui a trait aux superviseurs et aux gestionnaires, des séances de formation devront leur être octroyées afin de leur transmettre les compétences requises pour reconnaître les symptômes, les signes ou les comportements qui dénotent une intoxication ou une dépendance. De cette façon, ils seront aptes à imposer des tests de dépistage et des mesures disciplinaires en temps opportun. Ces actions peuvent vous sembler banales, par contre il ne faut surtout pas les négliger!

Enfin, un employeur doit redoubler de vigilance dans un tel contexte. Considérant ses obligations légales en matière de santé et de sécurité au travail, il pourrait être tenu responsable et exposé à des poursuites criminelles ou pénales si un accident de travail survient alors qu’il tolère un certain niveau de consommation au sein de son entreprise. Les accusations qui en résulteraient pourraient aller de simple négligence criminelle à négligence criminelle ayant causé la mort. Il est donc d’autant plus important de mettre sur pied une politique béton pour conserver un milieu de travail sain et sécuritaire tout en s’adaptant au nouveau mode de vie qui nous attend.