Walmart payera ses stagiaires qui présentent une déficience intellectuelle
31 juillet 2019
Il y a un peu plus d’un an, Walmart s’était retrouvé sous le feu des critiques en mettant fin aux stages de déficients intellectuels. Radio-Canada a appris que la multinationale leur offrira désormais une rémunération.
Walmart Canada lance un nouveau programme de stages pour les gens ayant une déficience intellectuelle ou un trouble du développement dans une trentaine de magasins au Québec.
Dorénavant, les stagiaires pourront être rémunérés. « De la même façon qu’on rémunère nos associés chez Walmart, donc un peu plus que le salaire minimum », précise Steeve Azoulay, directeur principal, affaires publiques de Walmart Canada. Ils auront aussi droit à des avantages sociaux, s’ils répondent à « certains » critères. Leur contrat sera renouvelable chaque année, pour une durée indéterminée.
Walmart offre aussi une autre option à ses stagiaires : faire un stage bénévole plutôt que rémunéré. Les participants recevront alors une indemnité quotidienne pour rembourser, par exemple, leurs frais de transport adapté.
Mais pourquoi ne pas payer tout le monde? « Il y a des participants qui sont bénévoles et qui ne veulent pas être rémunérés, parce qu’une rémunération peut avoir un impact sur leurs prestations sociales ou autres », répond Steeve Azoulay.
Pour conserver ses prestations du programme de solidarité sociale du Québec, un adulte qui vit seul peut gagner un revenu maximal de 200 $ par mois.
Les efforts de Walmart salués
La Société québécoise de la déficience intellectuelle avait dénoncé l’interruption brutale des stages en mars 2018. Des dizaines de personnes avaient alors perdu ce qu’elles considéraient comme un véritable emploi.
L’initiative de Walmart est un « premier pas », estime Anik Larose, directrice générale de la Société québécoise de la déficience intellectuelle. « Mais est-ce qu’on va leur donner la possibilité de progresser dans la compagnie? demande-t-elle. Ce n’est pas assez clair dans le nouveau programme ça va être quoi, la progression au niveau de l’échelle de salaire. »
Le professeur à l’Université du Québec à Trois-Rivières Martin Caouette salue les efforts de Walmart Canada. Selon lui, le nouveau programme soulève néanmoins de nombreuses questions.
« Si on a côte à côte les personnes qui font les mêmes tâches et que certaines sont rémunérées, d’autres pas, bien, je me questionne finalement sur la véritable reconnaissance qu’on a de la valeur du travail accompli », dit le chercheur à l’Institut universitaire en déficience intellectuelle et en trouble du spectre de l’autisme.
Martin Caouette craint que des stagiaires rémunérés demeurent éternellement stagiaires. « Walmart choisit de rémunérer ses stagiaires au même taux horaire que ses associés. Pourquoi il ne procède tout simplement pas à l’embauche de ces personnes-là? » Après tout, dit-il, les participants effectuent de véritables tâches : aider les clients à trouver des produits, plier des vêtements, etc.
Walmart assure qu’il sera possible pour les stagiaires de devenir, un jour, des associés.
Par ailleurs, les nouveaux participants qui choisiront d’être bénévoles ne pourront renouveler leur stage qu’une seule fois, pour un maximum de deux ans. Une mesure, fait valoir Walmart Canada, qui permettra aux jeunes d’acquérir d’autres expériences de travail.
Martin Caouette croit que cette limite pourra générer des déceptions. « Si la personne [stagiaire] se perçoit comme étant un travailleur, pour elle, le sens qui vient d’être donné à cette situation-là, c’est encore une fois : ”J’ai perdu le milieu où j’allais travailler et je dois maintenant aller travailler dans un autre endroit” », dit-il.
Pour écouter le reportage de Marie-Eve Cousineau, cliquez ici.
Les effets positifs de l’affaire Walmart
L’affaire Walmart a suscité l’indignation dans la population. Mais elle a eu des retombées positives, selon Laurence Marin, directrice du Regroupement des organismes spécialisés pour l’emploi des personnes handicapées (ROSEPH). « Cela a eu le mérite de faire parler de ce sujet, dont on parle trop peu dans l’actualité, dit-elle. De nombreux employeurs ont contacté le ROSEPH et surtout les services d’employabilité membres de notre regroupement. »
Avec la pénurie de main-d’œuvre actuelle, les entreprises s’intéressent de plus en plus à cette main-d’œuvre, selon elle.
Source: https://ici.radio-canada.ca